L'ozone, un filtre sélectif envers les UV
Les UVC n'atteignent jamais la surface terrestre. Les UVB sont, en très grande proportion, absorbés par l'ozone, et les UVA le sont très peu.

Dans le spectre des ondes électromagnétiques émises par le Soleil, les longueurs d'onde des ultraviolets, de 200 à 400 nm, sont comprises entre celles des rayons X et celles du rayonnement visible.

Les différents types de rayons ultraviolets sont fonction de leurs longueurs d'ondes :
Ultraviolets | longueurs d'onde en nm |
UV C | 200-280 |
UV B | 280-320 |
UV A | 320-400 |
Les principaux absorbants dans l'ultraviolet sont l'azote, l'oxygène, le dioxygène et l'ozone. Azote, oxygène et dioxygène absorbant peu au-delà de 200 nm, l'absorption par l'ozone est particulièrement importante. L'ozone possède une bande d'absorption dans le domaine des longueurs d'onde comprises entre 200 et 300 nm avec un maximum d'efficacité à 255 nm. Il absorbe aussi entre 300 et 360 nm mais plus faiblement. En conséquence, le rayonnement inférieur à 310 nm n'atteint pas la surface terrestre [1]. Ainsi les UVC sont-ils totalement filtrés, les UVB en très grande proportion et les UVA partiellement.
Toute diminution de la quantité d'ozone stratosphérique met donc en péril la qualité du filtre. Un appauvrissement de la couche d'ozone fait monter l'intensité des UVB au niveau du sol d'environ le double de la baisse de l'ozone en pourcentage, tous autres facteurs exclus. Par exemple, si l'ozone est appauvri de 30 %, la quantité d'UVB atteignant la surface de la Terre augmente de 60 %. [2]
Les modèles informatiques prédisent qu'une diminution de 10 % de la concentration d'ozone stratosphérique pourrait provoquer chaque année 300 000 cancers cutanés, 4 500 mélanomes et entre 1,60 million et 1,75 million de cas de cataracte de plus dans le monde. [3]
Voyons plus précisément quels sont les effets des UV sur la santé. Certes, ils peuvent induire des cancers graves mais ils n'ont pas que des inconvénients.
[1]R.Delmas, G. Mégie, VH. Peuch, Physique et chimie de l'atmosphère - Ed Belin 2005
[2] L'ozone, l'écran solaire de la Terre - Joanne Agtenberg- Daniel Brassard
[3]Organisation mondiale de la santé
Les effets des UV sur la santé
La peau est l'interface entre l'organisme et son environnement. C'est un organe complexe constitué de trois couches : l'épiderme, épithélium de revêtement, le derme, tissu conjonctif, et l'hypoderme, couche de tissu adipeux. Si cette structure est commune à tous les êtres humains, la grande variabilité de la pigmentation de la peau lui confère un rôle protecteur contre les rayonnements qui est très variable selon les individus. Nous ne sommes pas égaux face au Soleil.
Le comportement de la peau vis-à-vis du rayonnement solaire
La surface de la peau, au niveau de la couche cornée, réfléchit une partie du rayonnement solaire, essentiellement le rayonnement visible et les UVA. Les peaux claires réfléchissent plus efficacement le rayonnement que les peaux sombres (40% du rayonnement est réfléchi par une peau blanche). L'absorption se fait à tous les niveaux de la peau et est fonction de la longueur d'onde. Les photons qui pénètrent le plus profondément sont ceux dont la longueur d'onde est la plus grande et donc dont l'énergie est la plus faible. Le rouge et les infrarouges parviennent jusqu'à l'hypoderme et sont responsables de la sensation de chaleur. La majorité des UVA traverse l'épiderme, 20 % parviennent au derme. Quant aux UVB, ils sont essentiellement absorbés par la couche cornée et par la mélanine, pigment qui donne à la peau sa coloration. Chez le sujet à peau noire, 90% des UVB sont absorbés par la mélanine.
Absorption du rayonnement solaire par les différentes couches de la peau d'après [1]
Les effets immédiats sur la peau
Le "coup de soleil", ou érythème actinique (= rougeur due aux rayons).
Il est le résultat d'une forte exposition au soleil sans protection. Les manifestations sont variables d'un individu à l'autre selon son type de peau claire ou foncée. Elles vont de la coloration rose pâle de la peau, fugace, aux cloques avec atteinte de l'état général correspondant à une brûlure au 2ème degré. Ce sont essentiellement les UVB qui sont en cause mais aussi les UVA. Sur le plan histologique, le coup de soleil se caractérise par l'apparition de kératinocytes, cellules de l'épiderme, en apoptose ou mort cellulaire, suite, entre autre, à des dommages causés à l'ADN. Il s'agit d'une réaction inflammatoire se traduisant au niveau du derme par une vasodilatation.Les coup de soleil semblent banals, mais on a démontré que leur répétition durant l'enfance joue un rôle crucial dans l'apparition de certains cancers de la peau bien des années plus tard.

L'exposition solaire provoque un épaississement de l'épiderme et en particulier de la couche cornée. Ce sont les UVB qui induisent un accroissement de la prolifération des kératinocytes. Cette augmentation de l'épaisseur de l'épiderme diminue la pénétration des rayons UVB et leurs effets délétères. Les UVA n'ont pas ces effets, donc les expositions dans les solariums ne créent pas cette photoprotection.

Effets retardés
Le bronzage est un assombrissement de la peau induit par une exposition aux ultraviolets. Il résulte de la stimulation de la synthèse des mélanines, pigments responsables de la coloration de la peau. La mélanogénèse est la principale réaction physiologique de protection contre le vieillissement prématuré et les cancers de la peau photoinduits.
Comment expliquer que certains bronzent vite et d'autres pas du tout ?
Nous n'avons pas tous la même couleur de peau. La mélanine est produite et stockée dans des vésicules, les mélanosomes, au sein des mélanocytes, cellules de l'épiderme. Puis les mélanosomes migrent dans les dendrites du mélanocyte et passent dans les kératinocytes qui sont les cellules les plus abondantes de l'épiderme. Nous avons le même nombre de mélanocytes mais le nombre, la taille et le contenu des mélanosomes varient selon les individus. Les peaux foncées contiennent un grand nombre de gros mélanosomes isolés, alors que les peaux claires en contiennent moins, ils sont plus petits et regroupés en paquets entourés d'une membrane. Ces caractères sont sous contrôle génétique.

Répartition des mélanosomes dans les différentes cellules de l'épiderme
dans le cas d'une peau claire et dans le cas d'une peau sombre d'après [1]
Dans les peaux sombres, les mélanosomes assez gros sont transférés un à un des mélanocytes aux kératinocytes par phagocytose. Ils sont encore présents dans les cellules de la couche cornée. Alors que dans les peaux claires, les mélanosomes sont regroupés en complexes. Ils sont digérés dans la couche de cellules à épines encore appelée couche de Malpighi.
Le bronzage est induit par les ultraviolets, UVB essentiellement, mais aussi UVA. Il s'agit d'une réponse adaptative du mélanocyte à des expositions répétées au soleil. Tous les stades de la mélanogénèse sont activés. Des travaux in vivo et sur des mélanocytes en culture ont montré que les UV stimulent ou inhibent des hormones et des enzymes intervenant dans la biosynthèse complexe de la mélanine. Des mélanocytes inactifs se réveillent. Le transfert des mélanosomes est accéléré. Arrivés dans les kératinocytes, ils se disposent en bouclier au-dessus du noyau, protégeant ainsi l'ADN. Donc les individus qui génétiquement possèdent peu de mélanine sont moins bien armés pour lutter contre les UV. Mais ce n'est pas seulement une question de quantité. Ils existe deux types de mélanines chez les mammifères : les phéomélanines, pigments jaunes ou rouge-brun et les eumélanines, pigments brun-noir, synthétisés chacun dans des mélanosomes spécifiques. Le rapport eumélanines/phéomélanines dans l'épiderme et le niveau de protection de la peau sont corrélés. Plus la peau est riche en eumélanines, plus elle est protégée. Les sujets à peau blanche et aux cheveux roux dont l'épiderme contient beaucoup de phéomélanines ont un risque élevé de cancers de la peau photoinduits.
La diminution des défenses immunitaires. L'exposition aux UV modifie les réponses immunitaires. L'épiderme contient des cellules du système immunitaire, les cellules de Langerhans, dont le fonctionnement est altéré par les UVB. L'apparition répétée sur les lèvres des éruptions dues au virus de l'herpès simplex sous l'effet de l'exposition au soleil est un exemple de l'immunodépression induite par les UV. Celle-ci est aussi un facteur aggravant des cancers cutanés.
Et à plus long terme ?
Les doses UV reçues par la peau sont cumulatives et les conséquences chroniques de l'exposition au soleil se font sentir avec l'âge. En voici quelques manifestations cliniques :
- Un vieillissement prématuré de la peau : les UVA qui pénètrent jusqu'au derme endommagent les fibres de collagène et les fibres d'élastine, ce qui se traduit par une perte d'élasticité de la peau et l'apparition de rides.
- Les tâches de rousseur chez les sujets jeunes ou les lentigos chez les personnes âgées, tâches brunâtres sur les mains, concernant surtout les personnes au teint clair.
- Les grains de beauté qui sont des tumeurs bénignes se développant dans l'épiderme et qui apparaissent longtemps après une exposition au soleil dans le jeune âge. Leur évolution est à surveiller car ils peuvent évoluer en cancer.
- Les kératoses solaires (= actiniques), petites plaques squameuses du visage et des mains dues à des multiplications précancéreuses de kératinocytes.
Le risque le plus grand effectivement est la survenue d'un cancer.
Il existe trois principaux types de cancers de la peau :
- Les carcinomes ou épithéliomas baso-cellulaires concernent les kératinocytes de la couche basale de l'épiderme. Ils ne donnent qu'exceptionnellement des métastases et se traitent bien.
- Les carcinomes ou épithéliomas spino-cellulaires sont plus invasifs. Ils peuvent donner des métastases. Ils affectent les kératinocytes de la couche intermédiaire de l'épiderme où les cellules présentent des épines.
- Les mélanomes affectent les mélanocytes. Ce sont les plus graves. Ils donnent précocement naissance à des métastases.
De nombreux arguments permettent de penser que ces cancers sont liés à l'exposition aux UV : leur localisation élective dans les régions du corps exposées au soleil, leur incidence plus grande parmi la population travaillant au grand air, pêcheurs, marins, agriculteurs, professionnels et amateurs de haute montagne ainsi que chez les adeptes des bains de soleil.
Quel est le rôle des UV dans la cancérisation ? Et d'une façon plus générale, quelle est l'action des UV au niveau moléculaire ?
Les cibles moléculaires des UV
La peau contient des chromophores c'est-à-dire des molécules capables d'absorber les photons : l'ADN, les mélanines, des protéines comme les kératines. L'absorption de photons conduit à des états atomiques excités instables. Leur désactivation peut alors entraîner la formation de radicaux libres dangereux pour les structures cellulaires.
Action sur l'ADN
Les photons UVB sont directement absorbés par l'ADN. Si deux thymines, ou deux cytosines, ou une thymine et une cytosine (bases de l'ADN) sont situées côte à côte dans la double hélice, la réaction photochimique conduit à la formation de dimères. Ces modifications dans la structure de l'ADN, si elles ne sont pas éliminées par les systèmes de réparation, perturbent le fonctionnement de la cellule et peuvent induire sa mort. Plus gravement, elles peuvent engendrer des mutations, particulièrement les changements de séquences suivants : TC ? TT et CC ? TT. Ces mutations ont été retrouvées dans des oncogènes et sont considérées comme la signature de l'exposition au soleil. Les UVA ont une action plus limitée sur l'ADN : ils agissent essentiellement sur les thymines mais ils ont aussi une action délétère par le biais de radicaux oxydants.
Dans le cas des cancers de la peau, les rayons UV interviennent à chaque étape de la cancérogenèse :
1. Les UV provoquent une mutation dans une cellule épidermique. C'est l'événement initiateur.
2. La mutation se maintient et la cellule mutée donne naissance à un clone. Cela implique un dysfonctionnement des mécanismes protégeant le génome et l'activation d'un ou plusieurs oncogènes, là encore sous l'action des UV. Par exemple, le gène p53 code la synthèse d'une protéine qui intervient dans la réparation de l'ADN. Il joue aussi un rôle dans l'apoptose qui élimine de l'organisme les cellules dont l'ADN est lésé. La mutation du gène p53 est observée dans 60 à 80 % des cancers de la peau.
3. L'expansion du clone de cellules mutées est entretenue par une irradiation chronique aux UV.
4. Les UV comme on l'a vu ont une action immunosuppressive sur le tissu exposé, localement. Ils réduisent l'efficacité de la vigilance du système immunitaire vis-à-vis des tumeurs cutanées.
Ainsi entre la première exposition au rayonnement ultraviolet et le cancer, il peut s'écouler des dizaines d'années.
Action sur les protéines
Les UVB de longueur d'onde 280 nm détruisent les résidus tryptophane, acides aminés des protéines, avec une absorptivité 10 fois supérieure à celles des bases de l'ADN et produisent des espèces activées de l'oxygène. Ainsi l'action des UV sur les protéines constituant le cristallin de l'œil conduit à la cataracte. Des études épidémiologiques ont mis clairement en évidence une corrélation entre les expositions prolongées et répétées au rayonnement solaire et l'apparition précoce de cataracte. En effet, chez l'adulte, les UVB et les UVA sont absorbés par la conjonctive, la cornée et le cristallin. Ils n'atteignent pas la rétine. Ce n'est pas le cas chez l'enfant. Avant l'âge de un an, la transparence du cristallin permet à 90 % des UVA et une grande partie des UVB de parvenir à la rétine. Ces proportions diminuent avec l'âge.

Absorption du rayonnement ultraviolet par les structures de l'œil © SVT Dijon.
Photosensibilisation
Certaines substances mises en contact avec la peau ou ingérées peuvent déclencher des réactions pathogènes associées à une exposition au soleil : médicaments, essences végétales, produits ménagers, cosmétiques. La conséquence est soit une réaction inflammatoire de type coup de soleil, soit une réaction allergique.
Bilan : à part la synthèse de la vitamine D, quelques aspects de l'immunosuppression, le bronzage dont il faut se méfier, les UV ont plutôt des actions délétères sur l'organisme. Il est donc impératif de se protéger des rayonnements ultraviolets.
Sources
[1]A. Mélissopoulos, C. Levacher- La peau, structure et physiologie- Ed. Lavoisier
Sous la direction de Louis Dubertret - Soleil et santé - Ed. Lavoisier
JP Richalet, JP Herry - Médecine de l'alpinisme et des sports de montagne- Ed. Masson
Harrison- Principes de médecine interne - M/S Flammarion
P. Léonardi- La couleur de la peau : une variable continue- Pour la Science n° 13-novembre 2002
C.Bertolotto, R. Busca, R. Ballotti, JP. Ortonne- L'AMP cyclique est un régulateur de la pigmentation de la peau-M/S n°2, vol.17, février 2001
T. Douki, MT. Leccia, JC. Béani, S. Mouret, J. Cadet, A. Favier- Effets néfastes du rayonnement UVA solaire. De nouveaux indices dans l'ADN- M/S n°2, vol.23, février 2007
T. Douki, JL Ravanat, D. Martovitsi, E. Sage - Comment l'ADN réagit sous le soleil - Pour la Science - n°406 - août 2011
Rayons UV et rayons thermiques : P. Thomas, V. Daniel
Se protéger contre le rayonnement ultraviolet
La pigmentation de la peau constitue une protection naturelle. Déterminée génétiquement, son efficacité est très variable selon les individus. Une classification des types de peau a été établie en fonction de la sensibilité au soleil et de la capacité au bronzage.

Plus le phototype est faible, plus la personne doit prendre les moyens de se protéger du soleil.
Comment ?
- Par le comportement : éviter toute exposition solaire non indispensable en particulier aux heures chaudes de la journée.
- Par le port de vêtements qui constituent la protection la plus efficace, et de lunettes de soleil.
- Par l'emploi de filtres ou d'écrans solaires qui doivent protéger à la fois contre les UVB et les UVA et dont l'indice de protection doit être d'autant plus élevé que la peau est claire.
Bien sûr, il faut tout particulièrement veiller à protéger très efficacement les jeunes enfants.
D'autre part, l'intensité du rayonnement est variable et les précautions à prendre doivent en tenir compte. Il varie en fonction de la saison, de l'heure, de la latitude mais aussi de l'altitude : la quantité des UVB augmente de 4% tous les 300 m, ce qui fait 65% d'UVB en plus au sommet du Mont Blanc, 120 % au sommet de l'Éverest. D'où les précautions particulièrement drastiques que doivent prendre les alpinistes.
Des campagnes de prévention sont organisées par les organismes nationaux et internationaux de protection de la santé. Voir par exemple :
- sur le site de la Sécurité solaire, centre collaborateur de l'OMS, des conseils pour se protéger, des activités pédagogiques pour l'école primaire et le collège, de nombreux outils ludo éducatifs.
L'Organisation mondiale de la santé et l'Organisation mondiale de la météorologie recommandent d'utiliser une échelle universelle, l'indice UV (ou index UV), qui informe sur le niveau de risque d'une exposition au soleil. L'indice varie de 1 (faible) à 11(extrême).
Ung uide pratique sur l'indice universel de rayonnement UV solaire récapitule les données pour différents pays.
Météo France publie chaque jour les prévisions de l'index UV permettant à chacun de veiller à se protéger efficacement.