Un phénomène extrême : les cyclones
- Dean, un cyclone de l'hémisphère Nord
- Les cyclones
Un phénomène extrême : les cyclones
Dean, un cyclone de l’hémisphère nord (2007)
- Dean, un cyclone de l'hémisphère nord – 2007 Dean, un cyclone de l'hémisphère nord – 2007
- Les moyens d'observation Les moyens d'observation
- Modéliser pour prévoir Modéliser pour prévoir
- Suivi du cyclone Dean par les satellites Suivi du cyclone Dean par les satellites
- Informer et protéger les populations : la vigilance cyclonique Informer et protéger les populations : la vigilance cyclonique
- Les conséquences humaines et économiques Les conséquences humaines et économiques
Dean, un cyclone de l'hémisphère nord – 2007
L'ouragan Dean
Dean a eu lieu du 13 au 22 août 2007. C'est le premier ouragan à toucher les Antilles françaises depuis plus d'une décennie. Il a été le plus intense de la saison cyclonique 2007 avec une intensité de classe 5 sur l'échelle de Saffir-Simson. Le 21 août la vitesse du vent maximal soutenu était de 275 km/h (150 nœuds) et la pression minimale de 905 hPa. Il a été le premier ouragan depuis Andrew (1992) à toucher des côtes avec une intensité de catégorie 5.
et traitées par le CMS de Lannion - © Météo-France
Le tracé représente la trajectoire de l'ouragan, un point toutes les 6 heures,et les couleurs la variation de son intensité.
Les moyens d'observation
On utilise d'abord les stations météorologiques traditionnelles situées au sol ou en mer (bouées ancrées ou dérivantes) et aussi les radars pour la détection des précipitations.
Mais du fait du parcours des cyclones sur de vastes étendues océaniques dépourvues de stations d'observation, ce sont les satellites qui jouent un rôle primordial pour le suivi des cyclones.
Enfin, lors d'épisodes cycloniques sur l'Atlantique tropical et la mer des Caraïbes, le gouvernement américain (la NOAA et l'armée) déploie deux types d'aéronefs capables de faire des observations : les « hurricane hunters » qui pénètrent à l'intérieur des systèmes pour y faire des mesures des paramètres météorologiques, et des avions jets qui répandent un grand nombre de « drop sondes » au-dessus du phénomène et de son environnement, de manière à initialiser les modèles de prévisions avec un maximum de données dans les trois dimensions.
1. Les stations météorologiques terrestres
Quelques exemples de données :
• La pluviométrie les 16 et 17 août 2007, au moment où l'ouragan Dean atteint la Martinique.

Hauteurs de pluie en mm (1mm = 1litre/m2) cumulées sur des laps de temps de 1, 3, 6, 24 et 36 heures
pour 10 stations de la Martinique au moment du passage de l'ouragan Dean.

• Des mesures de pression :

Evolution de la pression les 16 et 17 août 2007, station de l'aéroport du Lamentin
2. Les bouées
Pour disposer d'observations en mer, les services météorologiques ancrent des bouées, véritables stations météorologiques.
En vert, les stations françaises ; en bleu, rouge et gris, les stations américaines.
(NDBC est un service de la Noaa, WHOI, un institut océanographique américain) © Noaa NDBC
Pour voir toutes les bouées du monde : http://www.ndbc.noaa.gov/
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Bouée américaine | Bouée française |
Variations de la hauteur des vagues au passage de l'ouragan Dean
enregistrées par la bouée Sainte Lucie au sud de la Martinique
et la bouée Fort de France à l'ouest. (Voir leur emplacement sur la carte ci-dessous.) ©Météo France
En bleu : H 1/3 max, hauteur maximale du tiers des plus fortes vagues en m.
En rouge : H max, hauteur maximale des vagues en m.

Localisation de sept stations terrestres à La Martinique et de trois bouées au large des côtes
Les données concernent le vent et la hauteur des vagues le 17 août 2007 à 10 heures :
«10'max wind» : moyenne de la vitesse du vent.
«max gust» : vitesse maximale du vent instantané.
«H1/3 max» : hauteur maximale du tiers des plus fortes vagues (indice qui correspondrait à ce qu'un observateur pourrait évaluer)
«H max» : hauteur maximale des vagues.
Cliquer sur le lien ci-contre pour agrandir .
Télécharger des données météorologiques acquises les 16 et & 17 août 2007 : pression au niveau de la mer, pluviométrie, vents, hauteur des vagues, pour les stations cartographiées ci-dessus.
3. Les radars
Le radar émet des impulsions électromagnétiques puissantes qui sont renvoyées par les gouttes de pluie. Il en déduit la localisation et l'intensité des précipitations. Il tourne sur lui-même pour une détection à 360 degrés. Et, pour une meilleure détection, il émet selon plusieurs sites, c'est-à-dire plusieurs angles de visée.

Fonctionnement d'un radar.
En vert le rayonnement émis ; en rouge, le rayonnement reçu.

Ci-dessus, rotation du radar et émission selon plusieurs angles de visée ou sites.

Le rayon de chaque cercle fait 400 km. L‘intensité des pluies est exprimée en mm/h.
Une image « mosaïque » de tous les radars de la région permet de suivre la progression d'un cyclone à l'approche des côtes.
Animation de la tempête tropicale Tomas
Le cyclone Dean
Mais du fait du parcours des cyclones sur de vastes étendues océaniques dépourvues de stations d'observation, ce sont les satellites qui jouent un rôle primordial dans le suivi des cyclones.
4. Les satellites
Les satellites américains GOES évoluent sur une orbite géostationnaire dans le plan équatorial, ce qui leur permet d'occuper une position apparemment fixe par rapport à la surface de la Terre, à 36 000 km d'altitude.
Parmi les instruments embarqués à bord des satellites GOES, un radiomètre permet d'obtenir des images dans cinq gammes de longueurs d'onde ou canaux résumés dans le tableau ci-dessous :


Chaque scène est acquise dans les cinq domaines de longueur d'onde, la première dans le visible, les trois suivantes dans l'infrarouge et la dernière dans le canal vapeur d'eau :
En combinant les données obtenues dans les différents canaux et en jouant sur des couleurs on « compose » des images de grande valeur informative :

Le cyclone Dean le 17 août à 13h
Satellite GOES- Les 5 canaux et une composition colorée.
© Météo France- Centre de Météorologie Spatiale – Lannion
5. Les avions
• Les Hurricane Hunters
Pourquoi envoie-t-on des avions dans les ouragans ?
Pour faire la meilleure prévision possible concernant la trajectoire et l'intensité d'un cyclone. Pour cela, il faut d'abord faire les meilleures observations et analyse du phénomène.

Il est très important de connaître :
• la position la plus précise possible du centre du cyclone,
• l'intensité la plus précise possible du cyclone (force des vents, pression) et sa tendance ou variation,
• le rayon d'action (la taille) du cyclone et sa structure (dissymétrie des vents par rapport au centre).
• Les missions synoptiques
C'est entre les altitudes 400 et 800 hpa que le besoin d'informations est le plus important, et c'est là que l'on a le moins de données ! On peut compenser ce manque par des sondages avions ponctuels dans des régions spécialement ciblées où des phénomènes météorologiques vont influer sur la trajectoire des cyclones. Des avions jets y répandent un grand nombre de « drop sondes ».
Une drop sonde est l'équivalent d'un ballon sonde mais elle fonctionne dans le sens descendant. Il s'agit d'un petit module d'instruments largué à l'arrière de l'avion avec un petit parachute. Tout au long de sa descente, elle transmet à l'avion les résultats des mesures des paramètres de l'atmosphère qu'elle traverse.
Notons l'amélioration des prévisions à 60 h : 35 %.
Modéliser pour prévoir
Les modèles numériques de trajectoire cyclonique utilisés dans l'Atlantique tropical sont de plusieurs types :
- statistique : ce type de prévisions repose sur la répétitivité dans l'espace et dans le temps des trajectoires des cyclones tropicaux. C'est le domaine de la climatologie et de l'analogie. On recherche alors, dans la base de données disponible, les cyclones anciens ayant des caractéristiques proches du cyclone étudié, en intensité, position, déplacement, au cours de la même partie de la saison, et on observe quelle fut leur évolution. On attribue alors au cyclone en cours le même type de comportement.
- dynamique : le principe est d'étudier le cyclone dans sa seule réalité météorologique du moment. Son environnement connu grâce aux différents paramètres analysés (vents, températures, humidité, pression atmosphérique, vitesse verticale, etc.), on cherche un flux directeur issu d'une combinaison des flux analysés et prévus à plusieurs niveaux d'altitude.
- statistico-dynamique : alliant les avantages des deux types précédents, ils combinent la statistique, par analogie aux comportements de cyclones répertoriés dans une base, et l'aspect dynamique, prenant en compte les différents aspects de l'environnement météorologique du cyclone étudié. Ce sont des modèles ayant la réputation d'être de bonne qualité, et qui ont fait leurs preuves durant les dernières années.
Toutes les 6 heures, une nouvelle analyse des caractéristiques du cyclone est établie, à partir des différents moyens d'observation possibles. On fait alors " tourner " (des " runs " en anglais) les différents modèles disponibles qui délivreront leurs résultats, sous forme de sorties graphiques ou numériques, 2 à 3 heures plus tard. Certains modèles, comme les modèles globaux plus longs et plus lourds à mettre en oeuvre, ne " tournent " que deux fois par jour.
Les différentes sorties sont alors exploitées immédiatement, le choix pour la prévision officielle qui sera ensuite publiée largement dans tous les messages et bulletins issus du NHC (National Hurricane Center) – les prévisions officielles des avertissements, en anglais «advisories», étant du ressort du chef prévisionniste du NHC de Miami.
Un exemple de trajectoire prévue (en couleur) par différentes simulations, comparée à la trajectoire réelle (en noir) suivie par le cyclone
Les progrès accomplis par les modèles de prévision peuvent être mis en évidence par la diminution des erreurs moyennes de prévisions de trajectoires.
Pour Dean les erreurs moyennes de trajectoire ont été de, respectivement, 39, 72, 107, 152, 261, 336 et 507 kilomètres pour les échéances 12, 24, 36, 48, 72, 96 et 120 heures.
Suivi du cyclone Dean par les satellites
Pour effectuer un suivi commenté de l'évolution du cyclone, plusieurs images ont été sélectionnées, du 13 au 22 août. Ce sont des compositions bi-satellites, c'est à dire des images combinées des satellites Goes et Météosat afin d'avoir une bonne vue d'ensemble sur l'Atlantique, la mer des Caraïbes et le golfe du Mexique.
1. Le phénomène est décelé : dépression tropicale n°4
Une ligne de grains africaine très active évolue le 11 août en onde d'Est entre les côtes et l'archipel du Cap Vert. Les conditions atmosphériques ne sont alors pas favorables à son développement, mais elles le deviennent dans la nuit du 12 au 13 août. Cette dépression est alors classée dépression tropicale n°4 le matin du 13 août dans l'est Atlantique, à 850 km environ au sud-ouest des îles du Cap Vert.

Image bi-satellite en infra rouge.
En rouge, les températures inférieures à -40°C. Cela souligne les phénomènes convectifs.
En orangé, les cirrus.
2. Dean menace et passe sur les petites Antilles
La dépression tropicale met un peu de temps, plus de 24 heures, avant de se renforcer et d'atteindre l'intensité d'une tempête tropicale, et poursuit son déplacement rapide vers l'ouest en direction de la mer des Caraïbes. Les Antilles françaises se mettent alors vite en vigilance jaune devant la menace cyclonique que représente Dean.
Situation le 14 août à 17 h UTC


Situation du 15 août à 17h UTC
A l'approche de Dean et conformément à la procédure de vigilance en vigueur aux Antilles françaises la couleur passe à l'orange le 15 août.
Situation le 16 août à 17 h UTC
Le 16 au matin, Dean devient un ouragan à moins de 1000 km de l'arc antillais - son œil commence à être discernable – et se développe encore. Il atteint l'intensité de classe 2, alors que les îles de la Guadeloupe et de la Martinique sont en phase de vigilance rouge.
Image bi-satellite en infra rouge du 16 août à 17 h UTC

Situation le 16 août à 23 h UTC
Dean traverse l'archipel des Petites Antilles dans le canal de Sainte-Lucie en fin de nuit du 16 au 17 août et durant la matinée du 17, le mur de l'œil touchant de manière sévère le sud de la Martinique, l'ensemble du département étant alors en phase de vigilance « violet ». Des rafales de l'ordre de 180 km/h sont enregistrées à Sainte-Anne et des cumuls de précipitations de 150 à 330 mm sont relevés lors de l'épisode pluvieux.
L'île subit des dégâts très importants, l'économie locale (bananes, canne à sucre, mais aussi le secteur de la pêche) étant durement touchée. Les îles voisines de Sainte-Lucie, Dominique et la Guadeloupe sont moins durement atteintes, mais des rafales supérieures à 100 km/h et la houle forte y ont aussi entraîné quelques désordres marquants.

Image bi-satellite en infra rouge du 16 août à 23 h UTC
3. Dean poursuit sa route et se renforce
Situation du 19 août à 17h UTC
L'ouragan poursuit sa route vers l'ouest en Mer des Caraïbes, et trouve alors des conditions de haute altitude particulièrement bonnes, puisqu'il va passer de la catégorie 2 à la catégorie 5 temporairement (maximum de la classification Saffir – Simpson) en moins de 24 heures les 17 et 18 août, sa pression minimale de surface s'abaissant à 920 hPa le 19 en soirée.
Il passe un peu au sud de la République Dominicaine et de Haïti où ses pluies diluviennes feront de nombreuses victimes et atteint le sud de la Jamaïque le 19 en fin de journée. De catégorie 4, il est alors très violent. Dans le sud de l'île de la Jamaïque, près des 2/3 des habitations sont détruites ou fortement détériorées. L'agriculture, notamment le secteur de la banane, est sévèrement touchée.
Image bi-satellite en infra rouge du 19 août à 17h UTC
Situation le 21 août à 00h UTC
Il poursuit ensuite sa route vers l'ouest en direction du Mexique.
Son œil se contracte, alors que le contact avec les eaux surchauffées de la région lui redonne un supplément d'énergie. Il atteint de nouveau l'intensité de classe 5 des ouragans dans la nuit du 20 au 21 août , juste avant de frapper la péninsule du Yucatan un peu au sud de Chetumal (Mexique), dans la région touristique de la Costa Maya.
Lors de son arrivée sur la côte, la pression minimale est alors estimée à 905 hPa. L'état du Belize souffre aussi durement de son passage.

Situation le 22 août à 21h UTC
Atténué par la traversée de la presqu'île, Dean est maintenant un ouragan moins intense qui gagne le sud du Golfe de Campêche dans le Golfe du Mexique. Il a cependant gardé une certaine vigueur malgré un passage un peu long sur les terres.
Il va de nouveau « atterrir » le 22 août sur une autre région mexicaine, celle située du côté de Tuxpan et Tecalutla.
Il est déclassé dans la nuit et devient ensuite une forte perturbation pluvieuse responsable d'inondations et de coulées de boue sur les hauteurs dominant la capitale Mexico.

La trajectoire du cyclone Dean

Document réalisé à partir des observations de la progression du satellite
synthétisant les positions successivement occupées par le centre du cyclone, du 13 au 22 août 2007
Dans le Nord Atlantique, les cyclones se déplacent d'abord dans le sens des alizés puis effectuent un grand virage en même temps qu'ils remontent en latitude, ce qui les conduit à se déplacer ensuite vers l'ouest. Ils sont alors parfois repris par la circulation générale de l'est vers l'ouest aux latitudes des zones tempérées. Le document ci-dessous qui récapitule les trajectoires des cyclones de la saison 2006 montre bien ces trajectoires en parabole.
Dean n'a pas eu l'opportunité d'effectuer ce virage, contraint par de hautes pressions au nord de sa trajectoire.

Informer et protéger les populations : la vigilance cyclonique
La surveillance et la responsabilité dans la diffusion des avis d'alerte cycloniques sont attribuées dans le cadre d'accords internationaux sur l'ensemble des régions du monde concernés, sous l'égide de l'Organisation Mondiale de la Météorologie.
Ainsi, divers centres se partagent-ils la responsabilité d'informer et d'avertir les pays de leur zone respective sur l'existence et la mise en surveillance de tout cyclone tropical.
Pour le bassin Atlantique, de la Mer des Caraïbes, du Golfe du Mexique, mais aussi pour le nord-est du bassin pacifique, c'est le National Hurricane Center (NHC) de Miami qui a la charge de détecter, surveiller et aussi d'élaborer des prévisions cycloniques afin d'avertir du danger potentiel les différents services météorologiques de chaque pays ou territoire dans leur zone de responsabilité.
Ces prévisions permettent alors aux décideurs de ces états de déclencher éventuellement les plans spécialisés de prévention, tels celui que l'on connaît aux Antilles françaises sous le nom de plan spécialisé de secours cyclone (PSSC).
En Martinique comme en Guadeloupe, ce Plan s'est enrichi durant les 20 dernières années avec les différentes expériences vécues de menace ou de passage de cyclones sur nos îles.
Depuis 2006 aux Antilles, la procédure de vigilance météorologique est en vigueur, aussi bien pour ces dangers dus aux cyclones tropicaux, mais aussi pour les risques météorologiques classiques (fortes pluies, mer forte, etc…).
Elle ressemble à la procédure vigilance utilisée en métropole mais comporte des couleurs (violet, gris) et des symboles supplémentaires.
Equivalence des termes employés dans la région :
Les conséquences humaines et économiques
Bien qu'Haïti n'ait pas été touché de plein fouet par le cyclone Dean en 2007, un nombre important de morts directes y a été déploré à cause des pluies diluviennes qui se sont abattues sur ce pays en grandes difficultés économiques.
En Martinique, le nombre de morts a été limité. Il est uniquement dû aux causes indirectes (attaques cardiaques et suicide).

Les chiffres fournis pour les dégâts ne sont pour la plupart que des estimations.
En revanche les dégâts matériels ont été très importants : environ 1300 habitations détruites et 7500 sérieusement endommagées. L'entière récolte de banane a été détruite et 70% de la récolte de canne à sucre.
Tous les secteurs de l'économie sont affectés par le passage d'un ouragan : la distribution d'eau et d'électricité, la téléphonie fixe ou mobile, l'agriculture, la pêche et le tourisme…
Ponton du Capès, commune du François le 18/08/2007 - Météo-France / J-N. Degrace
Commune du Vauclin le 18/08/2007 - Météo-France / S.Jamoneau
Dégâts sur les bananiers - Météo-France / S.Jamoneau