Découverte de la pression atmosphérique
Un peu d'histoire
La notion de poids de l'atmosphère est peu intuitive : nous ne " ressentons "pas le poids de l'air, parce que les organismes des êtres vivants sur Terre sont adaptés pour supporter ce poids.
L'idée que l'air est un fluide pesant s'est imposée au cours du XVIIe siècle, avec par exemple les travaux de Torricelli. En 1643, celui-ci a prouvé que l'air est un fluide pesant, en remplissant de mercure une éprouvette qu'il retourne sur un cristallisoir, lui aussi rempli de mercure : le mercure se met à l'équilibre dans l'éprouvette à une hauteur h de 76 cm, avec du vide au-dessus. Il y a équilibre entre le poids (par unité de surface) de l'air atmosphérique, et le poids (par unité de surface) de la colonne de mercure dans l'éprouvette.
En 1648, les expériences de Pascal à la tour Saint-Jacques, à Paris, et au puy de Dôme, ont confirmé l'hypothèse du poids de l'atmosphère ; c'est grâce à ce grand physicien que nous savons que la pression atmosphérique à un niveau quelconque est égale au poids d'une colonne d'air de surface horizontale 1 m2 située au-dessus de ce niveau, s'étendant jusqu'au sommet de l'atmosphère.
Définition de la pression (dans un fluide)
En effet, un fluide est composé d'atomes ou de molécules qui sont des assemblages d'atomes.
Ces atomes sont en mouvement incessant et désordonné.
Au cours de ces mouvements incessants, les molécules subissent des chocs, collisions, entre elles ou avec les parois qu'elles rencontrent. Chaque portion d'un fluide exerce ainsi une force sur les portions de fluide qui l'entourent, et réciproquement.
Pour définir la pression en un point M quelconque du fluide, on étudie les forces qui s'exercent sur un très petit élément de surface que l'on place (" pour de vrai " ou en pensée…) au point M. La valeur moyenne au cours du temps des forces de choc exercées par les molécules de fluide se trouvant d'un côté de l'élément de surface, s'appelle la force de pression.
Cette force est perpendiculaire à l'élément de surface. Si on le fait pivoter autour de son centre, la force de pression s'exerçant sur lui pivote, mais son module reste constant.
Par définition, la pression en M est égale à :
où est le module de la force de pression s'exerçant sur
Variation de la pression atmosphérique
Dans l'atmosphère, la pression décroît très rapidement avec l'altitude. En moyenne, la courbe donnant la correspondance entre la pression et l'altitude est la suivante :
La loi permettant de calculer la variation de pression pour un dénivelé
est :
où est la masse volumique de l'air, et
l'accélération de la pesanteur.
On retiendra que, dans les basses couches, la pression diminue environ de 1 hPa quand on s'élève de 8 m.
Comme la masse volumique diminue avec l'altitude, le taux de décroissance diminue quand l'altitude augmente, et aux alentours de 16 km par exemple, la pression diminue de 1 hPa pour un dénivelé de 60 mètres.
Variations horizontales de la pression atmosphérique
Dans l'atmosphère, la pression varie beaucoup plus rapidement lors d'un déplacement vertical que lors d'un déplacement horizontal. Au niveau de la mer, l'ordre de grandeur des variations de la pression pour un déplacement horizontal est de quelques hectopascals pour cent kilomètres, alors que l'on a vu que la pression diminue d'environ un hectopascal pour une dizaine de mètres de dénivelé.
L'influence du relief sur les valeurs de la pression au niveau du sol est donc déterminante. En fait, une carte rassemblant des mesures de pression effectuées au niveau du sol donnerait essentiellement des informations sur les différences d'altitude entre les différents points de mesure.
Afin de pouvoir comparer les différentes mesures de pression entre elles, les météorologistes considèrent donc des cartes de pression " réduite au niveau de la mer " : en effet, il est possible d'estimer à partir des données de pression, de température et d'humidité au sol, la pression que l'on aurait à un niveau de référence donné, que l'on prend par convention comme étant le niveau moyen de la mer.
Sur ces cartes de pression réduite au niveau de la mer, on s'aperçoit que la valeur de la pression réduite n'est pas la même partout. Il existe des zones où la pression présente un minimum relatif (les dépressions) et d'autres où la pression présente un maximum relatif (les anticyclones). Les lignes qui relient entre eux les points où la pression réduite est la même s'appellent les isobares.
Par convention, les isobares sont cotées en hPa, et tracées de 5 en 5 hPa.
Les unités de mesure de pression
La pression P est une grandeur dérivée du système international. Elle est définie comme le quotient d'une force par une surface.
Par définition, on a la relation : où P s'exprime en Pascal (Pa), F en Newton (N) et S en m².
La pression atmosphérique mesurée en météorologie correspond à la somme de deux pressions distinctes :
La pression hydrostatique correspond au poids de la colonne d'air s'exerçant sur une surface déterminée et s'étendant jusqu'au sommet de l'atmosphère. Elle décroît avec l'altitude : environ -1 hPa tous les 8 à 10 mètres entre 0 et 3 000 mètres d'altitude, puis on observe une diminution plus faible.
La pression hydrodynamique est la pression créée par un fluide en mouvement. Elle est définie par la relation :
avec
P en Pa,
en kg/m3 et
en m²/s².
À nos latitudes, la valeur de la pression atmosphérique oscille entre 950 et 1 050 hPa.
Le pascal
La pression peut s'exprimer selon plusieurs unités. L'unité du système international (unité SI) est le pascal (symbole Pa), mais la pression peut également être exprimée en bar (1 bar = 105 Pa) ou encore en millimètre de mercure (1 mmHg = 133,3 Pa). L'unité anglo-saxonne de la pression est le psi, pound per square inch (1 psi = 6 894 Pa).
En météorologie, la pression s'exprime en hectopascal (hPa), sous-unité du pascal :
1 hPa = 10² Pa.
Histoire du baromètre
La mesure de la pression s'effectue à l'aide d'un baromètre. Il s'agit d'un instrument permettant de repérer la pression de l'atmosphère dans laquelle il se trouve et ses variations temporelles.
Le premier baromètre a été inventé par Torricelli en 1644. Voulant mesurer les variations du poids de l'air, Torricelli remplit de mercure un tube de verre d'un mètre de long, fermé à une extrémité. Il le retourne et le plonge dans une cuvette remplie de mercure. Il constate alors que le niveau de mercure dans le tube s'abaisse, laissant un espace de vide au-dessus de lui. Il vient de découvrir la pression atmosphérique, comme il l'écrit dans une lettre : " Nous vivons submergés au fond d'un océan d'air élémentaire, dont on sait par des expériences incontestables qu'il a un poids. "
En 1647, Descartes ajoute une échelle graduée au tube de Torricelli. Le 19 septembre 1648, Pascal et son beau-frère Florin Périer réalisent l'expérience décisive qui confirme les variations de la pression atmosphérique avec l'altitude. Ils mesurent en effet la hauteur de mercure dans un tube de Torricelli à Clermont-Ferrand et au sommet du puy de Dôme et constatent la baisse de pression avec l'altitude. Pascal réalisera la même expérience à Paris, en haut et en bas de la tour Saint-Jacques. Ce scientifique est également l'inventeur du baromètre à siphon qu'il décrit dans son Traité de la pesanteur de la masse de l'air.
Au cours du XVIIe siècle, de nombreux scientifiques travaillent à perfectionner le baromètre : ils cherchent à amplifier la variation du niveau de mercure dans le tube lors de la variation de la pression. Descartes, Hooke puis Huygens conçoivent des baromètres à deux liquides, un volume d'eau surmontant la colonne de mercure. Des tubes aux formes diverses (coudés, en équerre) sont également élaborés.

En 1663, Robert Hooke construit le baromètre à cadran, premier instrument de mesure à cadran indicateur. D'autres baromètres sont ensuite construits dans l'optique de les transporter en mer ou en montagne.
À partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, physiciens et constructeurs œuvrent à mettre au point un instrument transportable, précis et fidèle.
En 1843, l'ingénieur Lucien Vidie construit le premier baromètre anéroïde. Le principe de mesure est établi sur la déformation d'une capsule anéroïde, membrane métallique élastique dont une face est en contact avec le vide et l'autre avec l'air atmosphérique. La capsule est déformable, mais l'écrasement est empêché par la forme de la capsule agissant comme un ressort.
Voyons quel en était le principe de mesure :
La pression atmosphérique exerce une pression Patm sur l'enveloppe métallique de la capsule ; cela crée une force de pression s'appliquant sur l'enveloppe et fonction de la surface de la capsule. En réponse à cette pression et en vertu du principe de l'action/réaction, le " ressort " exerce sur la capsule une force
de même direction et norme que
, mais de sens opposé. On déduit la variation de pression
de la variation d'écartement
. Le coefficient C représente la sensibilité du capteur et varie en fonction de l'élasticité du métal utilisé, de la géométrie de la capsule, entre autres.
Sur l'image ci-dessus à gauche, un empilement de capsules anéroïdes permet la visualisation des variations de pression sur un graphe. L'instrument représenté sur l'image de droite fonctionne suivant le même principe, la lecture de la valeur de pression s'effectue à l'aide d'une aiguille se déplaçant devant un cadran.
De nos jours :
Météo-France utilise le capteur représenté ci-dessous pour la mesure de la pression.
Le capteur de pression
Principe de la mesure
Météo-France utilise le capteur représenté ci-dessous pour la mesure de la pression et utilisant deux cellules capacitives.
Mode de fonctionnement de la mesure de pression à Météo-France
La cellule capacitive est un condensateur électronique. Voici ci-dessous la représentation symbolique d'un tel composant :
Aux bornes (connexions) de ce composant, nous mesurons une capacité C en farads.
s représente la surface des armatures en m².
représente (entre autres) la permittivité du diélectrique.
d représente la distance entre les deux armatures en m.
Seule la distance d nous intéresse ici.
La pression atmosphérique va plus ou moins compresser la cellule capacitive, faisant varier cette distance d.
Seule la distance d entre les armatures varie avec la pression atmosphérique. Cette variation entraîne une variation de capacité C dans l'équation ci-dessus. On note alors une corrélation entre la variation de capacité C et la variation de pression atmosphérique. Ajoutons pour les plus experts que le signal n'est pas utilisé tel quel : on ajoute au système un circuit oscillant nous permettant de récupérer une fréquence variant avec la pression atmosphérique.
De manière simplifiée, le signal électrique varie selon que la cellule est plus ou moins écrasée par la pression atmosphérique.
Question : comment se comportera une cellule capacitive embarquée sur une radiosonde lorsque celle-ci s'élèvera dans les airs ?
(réponse : avec l'altitude, la pression baisse, les armatures s'écartent)
Les baromètres du réseau de Météo-France utilisés actuellement sont des baromètres numériques compensés en température.
Photos 1 et 2 : baromètre numérique - © Météo-France
Le schéma suivant illustre leur principe de fonctionnement :
Figure 4 : Principe de fonctionnement du baromètre multicellule, avec C1 et C2, les deux capteurs de pression, F1 et F2 : les deux fréquences obtenues, P1 et P2 : les deux pressions mesurées - © Météo-France, Mylène Civiate et Flavie Mandel
: la température
Deux capteurs capacitifs de pression et deux circuits oscillants composent le baromètre pour que la mesure soit toujours effectuée. Si l'un des deux capteurs tombe en panne ou si l'on note une dérive dans la mesure, le deuxième capteur est là pour prendre le relais et effectuer les mesures.
Le baromètre numérique mesure la pression atmosphérique à l'aide de deux capteurs capacitifs : un capteur de pression et un capteur de température. En effet, la variation de la température entraîne une dilatation du capteur de pression qu'il faut prendre en compte lors de la mesure. Ces deux capteurs sont reliés à un circuit oscillateur qui délivre un signal. La fréquence de ce signal varie en fonction de la pression. Ce signal est ensuite traité par un microprocesseur qui calcule la valeur de la pression en tenant compte de la température et délivre les informations sous forme numérique. Des courbes d'étalonnage sont enregistrées dans la mémoire du microprocesseur pour tenir compte des caractéristiques de chaque capteur.
Les propriétés caractéristiques des deux capteurs capacitifs au silicium sont : une bonne répétabilité, une faible dépendance thermique et une bonne stabilité à long terme. Le capteur est également résistant aux chocs mécaniques et thermiques. Ce capteur est constitué de deux lames de silicium séparées par une lame de verre.
Figure 5 : Coupe d'une cellule capacitive. © Météo-France
Incertitude et résolution du capteur
La gamme de mesure des baromètres de Météo-France est : 800 - 1 060 hPa.
L'incertitude sur la mesure de la pression dépend du type du capteur ; elle est fournie avec l'instrument. L'incertitude générale est la somme de plusieurs incertitudes : la dérive à long terme, l'imperfection de la compensation en température, l'incertitude due à l'étalonnage entre autres. Météo-France garantit une exactitude de 0,5 hPa.
La résolution de mesure est de 0,01 hPa.
Contraintes d'installation du baromètre
Concernant tout d'abord l'environnement thermique, plusieurs précautions sont à prendre : éviter la proximité d'une source de chaleur (chauffage…), d'une source de rayonnement (fenêtre…) et éviter toute variation brutale de la température de la pièce dans laquelle se trouve le baromètre.
Il faut également tenir compte de la ventilation de la pièce dans laquelle on va installer le baromètre. Il est recommandé d'éviter toute pièce soumise à des courants d'air pouvant provoquer des surpressions dynamiques (un vent de 10 m/s peut créer une surpression de 0,2 hPa) et toute pièce climatisée.
Nous avons effectivement vu que :
Or, nous ne souhaitons mesurer que la composante hydrostatique de la pression atmosphérique.
Afin d'éviter au maximum les vibrations, l'appareil doit être installé sur un support stable ou muni d'amortisseurs adaptés.
Enfin, l'emplacement choisi doit être protégé de la poussière.
Si le baromètre est installé dans une station automatique isolée, il doit être protégé de la pluie, la présence d'eau pouvant nuire au capteur et générer des erreurs de mesure. On peut, par exemple, l'installer dans un coffret étanche à l'eau.
Normes internationales de mesure de la pression
Pour pouvoir comparer les valeurs de pression venant de stations situées à des altitudes différentes, la pression est ramenée au niveau de la mer. Ce calcul ne peut être effectué que pour les stations dont l'altitude est inférieure à 750 mètres car, au-dessus de cette altitude, la correction apporterait une trop grande erreur et la valeur brute est donc conservée.
On a la relation :avec dz le dénivelé,
la masse volumique de l'air et g l'accélération de pesanteur. Connaissant l'altitude de la station, on peut donc évaluer la variation de pression dP et obtenir la valeur de cette dernière si la station était située au niveau moyen de la mer.
Maintenance
Action de maintenance | Périodicité | Matériel nécessaire |
Etalonnage | Annuelle | Baromètre Etalon |
L'étalonnage est effectué à l'aide d'un baromètre numérique étalon. Il permet de corriger les dérives ayant eu lieu pendant l'année.
Il faut aussi vérifier régulièrement les bonnes conditions de fonctionnement du capteur (données cohérentes).
Remarque :
La manipulation des sondes n'engendre aucun risque de sécurité.
Variations et records de pression
Quelques valeurs extrêmes de pression atmosphérique réduite au niveau de la mer :
- Le record maximum de pression réduite fut relevé à Tosontsengel, dans le nord-ouest de la Mongolie, le 20 janvier 2010 : 1 086,8 hPa !
- Le record minimum fut relevé dans le Pacifique : 870 hPa au cœur du cyclone tropical TIP, le 12 octobre 1979.
En France métropolitaine
La pression la plus élevée a été relevée à la pointe de Chémoulin (Loire-Atlantique) le 3 mars 1990 : 1048.9 hPa
La pression la plus basse a été relevée à la pointe de La Hague (Manche) le 25 février 1989 : 951.8 hPa.